Le pilote de JM Honda Racing, Julien Lieber, a annoncé aujourd’hui qu’il se retirait de la compétition professionnelle, avec effet immédiat. Le Belge de 26 ans n’a pas passé beaucoup de temps à moto au cours des 12 derniers mois en raison d’une série de blessures qu’il a contractées lors de la manche allemande du championnat MXGP en 2019. Si la nouvelle peut choquer, pour Lieber – toujours animé par un esprit de compétition des plus féroces – la conclusion était inévitable.
Vous ne remarquerez jamais que quelque chose ne va pas si vous voyez Julien rouler seul sur une piste. Un style, un show et une aisance naturelle qui sont rares, même parmi les meilleurs pilotes du monde.
Le jockey de Malmedy est monté sur des podiums en EMX250, en MX2 et a terminé 4ème du GP d’Imola en MXGP en 2018. Lors de ses deux participations au MX des Nations, il a remporté l’argent (2014) et le bronze (2015) avec l’équipe belge. Il ne fait aucun doute que le protégé d’Yves Demaria avait le potentiel pour se faire remarquer en MXGP au guidon de la Honda CRF450R JM Racing. Malheureusement, le destin en a décidé autrement.
Tu n’es remonté à moto qu’à la fin du mois de juin. Mais, vu de l’extérieur, tout semblait bien se passer à l’entraînement. Pourquoi décider d’arrêter maintenant ?
Julien Lieber : « Les conséquences de ma chute à Teutschenthal l’année dernière ont été beaucoup plus compliquées que ce que nous aurions pu imaginer au départ. J’ai subi deux opérations au coude et une au poignet. Dans les deux cas, il s’est avéré que la chirurgie ne pouvait pas faire grand-chose pour régler les problèmes. C’est ce à quoi j’ai dû faire face ces derniers temps. Même lorsque la douleur est fortement atténuée après une infiltration, tu sais que les blessures elles-mêmes ne disparaîtront pas comme par magie en quelques mois, voire en quelques années pour être réaliste ».
Ton esprit de compétition a-t-il accéléré ta décision?
Julien Lieber : « Absolument. Le niveau du championnat du monde MXGP est déjà élevé en soi, donc tu ne peux pas t’aligner et t’attendre à être compétitif si tu n’es pas à 100%. Même lorsque la douleur est supportable, je remarque que j’ai moins de puissance dans le bras gauche à cause du problème de coude et mentalement, tu ne te sens pas à l’aise pour pousser tes limites comme il le faudrait. C’est une situation dangereuse où il y a même un risque de subir plus de dommages encore. Surtout sur une moto qui est aussi puissante qu’une 450. »
« Le motocross est un sport génial. Les GP vont me manquer. »
« Chaque course de cette saison m’a laissé l’impression d’être à 80 %. Pour moi personnellement, il est absolument inutile de viser un top-15. Et je sais que ce n’est pas non plus le but de JM Honda Racing ! Jusqu’à l’année dernière, j’étais sur une trajectoire ascendante qui me permettait de m’améliorer et me rapprocher de mes objectifs. Je sais que nous étions sur la bonne voie avec les top-cinq que j’ai obtenus en 2018 et 2019. L’expérience nécessaire pour obtenir des résultats est là, mais à ce stade, je sens que mon corps ne me permet pas de les réaliser. »
Ce doit être une conclusion difficile à accepter lorsque l’on réalise que les ingrédients du succès sont là mais qu’il faut malgré tout jeter l’éponge ?
Julien Lieber :« C’est vrai, il y a un temps pour chaque pilote professionnel pour arrêter. Pour certains, c’est plus tôt que pour d’autres. Mais il est clair pour moi que c’est la meilleure décision. Une chose est absolument sûre, face à ces blessures, il ne sera pas possible d’être le Julien Lieber que j’étais avant cet accident, alors que j’étais deuxième derrière Tim Gajser à Teutschenthal… C’est dommage que cela doive se faire maintenant car j’étais très satisfait de mon programme pour 2020. Je sais que j’avais une grande opportunité pour me reconstruire avec JM Honda Racing. L’équipe est vraiment bonne, tout s’est très bien passé et j’ai tout de suite pris goût à la moto aussi. Dès la première fois que j’ai piloté la CRF450R, je suis tombé amoureux de sa maniabilité, c’est tellement facile d’aller vite avec cette moto ».
Quels resteront les points forts de ta carrière ?
Julien Lieber : « C’est sûr qu’en 2017, quand j’ai roulé au sommet en MX2 en tant que pilote privé avec ma propre équipe, c’était très spécial. Je suis revenu après un an et demi sans rouler en GP, après avoir été opéré de la hanche. C’était super difficile de rebondir. C’était incroyable de monter sur le podium de la course d’ouverture au Qatar, puis de prendre la plaque rouge en Argentine. Les deux saisons avec l’équipe d’usine Kawasaki MXGP ont été bien aussi. Dans l’ensemble, je suis heureux de ce que j’ai accompli, tant en MX2 qu’en MXGP, même si on veut toujours que ce soit plus – c’est pareil pour tout le monde ! Mais en fin de compte, il n’y a qu’un seul champion du monde ».
Quelle est la prochaine étape pour Julien Lieber ?
Julien Lieber : « D’une part, dès mon plus jeune âge, ma vie a consisté à tout faire pour devenir le meilleur pilote de motocross possible. C’est pourquoi il est encore plus difficile de laisser cette vie derrière soi. D’un autre côté, je suis encore jeune, donc c’est peut-être un avantage pour trouver une nouvelle direction. Je n’ai pas encore décidé ce que je voudrais faire exactement. Je prendrai mon temps dans les prochains mois pour le découvrir, mais j’aimerais rester actif dans le motocross. Il est certain que les prochains mois seront difficiles car je ne pourrai pas faire de compétition alors que c’est dans mon sang ! Je vais probablement continuer à faire du motocross, mais juste pour le plaisir, sans le stress de la compétition professionnelle ».
Sera-t-il difficile pour toi de suivre les derniers GP de la saison ?
Julien Lieber : « Absolument ! Ce sera difficile de regarder les courses et de réaliser que tu n’es plus un pilote de championnat du monde. Le motocross est toujours un sport génial et il va me manquer, mais c’est comme ça. Je suis convaincu que les choses s’amélioreront lorsque j’aurai de nouveaux objectifs dans la vie ».
Tu as disputé ton premier GP il y a 10 ans et tu as eu l’occasion de rouler partout dans le monde. Quels sont les circuits que tu as le plus appréciés ?
Julien Lieber : « Ces dernières années, j’ai vraiment aimé Orlyonok. C’est un circuit avec une bonne variété de sections et d’obstacles et le cadre est agréable aussi, avec la mer noire en toile de fond. Sevlievo, en Bulgarie, était aussi très cool. Au final, il y en a eu pas mal de sympas… (sourire) et de moins sympas bien sûr ! Mais chaque pilote a ses préférences et on a toujours tendance à aimer les pistes où l’on roule bien ».
Un dernier mot, des remerciements ?
Julien Lieber :« Je voudrais avant tout remercier ma famille qui m’a soutenu dès le premier jour, Pier Bottero qui m’a soutenu pendant les cinq dernières années avec Lovemytraining et Yves Demaria comme coach. Ce fut un excellent partenariat. Yves a une très grande expérience et il a été absolument crucial pour faire de ma carrière la meilleure qui puisse être. Merci pour tout Yves ! En outre, un grand merci à toutes les équipes, aux sponsors, aux fans et aux médias. Au fil des ans, en tant que pilote professionnel, j’ai rencontré beaucoup de gens formidables, beaucoup de personnes qui ont toutes fait leur part pour m’amener à mon meilleur niveau. Des mécaniciens, aux team managers et aux autres membres du staff, merci de croire en moi et de m’aider. Enfin et surtout, merci à Jacky Martens pour sa confiance et son professionnalisme ».