Interview Sven Breugelmans | Vers un 3ème titre mondial MX3 avec le Pater MX Team

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Malgré l’obtention de son deuxième titre de champion du monde en MX3, Sven Breugelmans vient de passer plusieurs mois difficiles. Déjà en juillet, lorsque Sven s’était blessé au poignet, on savait déjà que KTM ne s’engagerait plus dans le championnat mondial MX3 en 2009. Un double uppercut pour le pilote de Rijkevorsel, à¢gé de vingt-neuf ans, qui est toutefois arrivé à conquérir un second titre mondial tout à fait mérité. La fête terminée, il ne restait plus à Breugelmans qu’à prendre son bà¢ton de pèlerin afin de se trouver un nouveau team. Ce fut chose faite avec le Pater MX Team, un team néerlandais qui va lui permettre de poursuivre sa carrière de pilote professionnel et de défendre son titre mondial. La semaine dernière, nous avons rencontré Sven alors qu’il revenait de chez son médecin…


Voici un mois que tu as été opéré au poignet. Comment te portes-tu?

Sven Breugelmans: « Je viens de passer un scanner et tout va bien. On m’a mis une nouvelle attelle que je devrais pouvoir abandonner fin décembre. Si cela continue dans ce sens, je devrais pouvoir remonter sur la moto début janvier. »

Au moment où tu te faisais opérer, on apprenait que tu roulerais la saison prochaine dans le Pater MX Team, un team néerlandais. Après des mois d’incertitude, cela a dà» être un soulagement pour toi d’avoir enfin trouvé un team?

Sven Breugelmans: « Bien sà»r! Cela devient chaque année de plus en plus difficile dans le motocross. Je suis content d’avoir trouvé une place dans un team, il faut bien le dire. J’en étais déjà à envisager d’aller rouler dans une fédération amateurs. Grà¢ce à l’offre du Pater Team, je vais pouvoir défendre mon titre en 2009 et sans doute encore pouvoir rouler en GP pendant deux ans. C’est clair que sans un bon team, je me voyais mal encore rouler en Championnat du Monde. »

« je dois pouvoir vivre du motocross… »

Etre dans un bon team est certes important mais il y avait également un aspect financier que tu ne voulais pas négliger car tu as une compagne?

Sven Breugelmans: « Bien sà»r, car je dois pouvoir vivre du motocross. J’ai effectivement une compagne et nous sommes en train de construire notre maison. Il faut gagner sa vie et pouvoir régler ses factures. Evy, ma copine, travaille mais elle ne pourrait pas subvenir à nos besoins seule. »

Tout de suite après l’obtention de ton titre mondial, tu aurais pu profiter de ton titre mais, lors de l’épreuve de Pierreux, déjà, on voyait que tu étais inquiet…

Sven Breugelmans: « C’était le cas. J’avais des sentiments mitigés: d’un côté, j’étais heureux mais, en même temps, je savais que mon team arrêtait et qu’il allait falloir que je me retrouve une structure. C’est là que tu t’aperçois que trouver un nouveau team est tout sauf simple. En plus, dans mon cas, il fallait que mon nouveau team puisse me garantir un salaire. Je peux te dire qu’à ce moment-là, je ne voyais pas la vie en rose. »

Est-ce qu’une solution n’aurait pas été d’entrer dans un team de MX1?

Sven Breugelmans: « Peut-être, mais les teams d’usine ou équivalents étaient déjà complets. J’ai d’ailleurs été voir de tels teams mais tu dois savoir que chez TM, par exemple, ils avaient déjà une liste de quinze candidats! Tu comprendras que, dans ces circonstances, un team comme TM a l’embarras du choix et qu’il fera en sorte de prendre le meilleur rapport qualité-prix! Enfin, il reste des teams pour lesquels tu peux rouler gratuitement ou pour lesquels tu dois amener un budget. Que peux-tu espérer comme retour dans de ce contexte-là? Rien, à mon avis. »

As-tu encore l’ambition de rouler en MX1 ou est-ce pour toi quelque chose de révolu?

Sven Breugelmans: « Non, certainement pas. Si, l’an prochain, je devais recevoir une proposition intéressante pour rouler en MX1, je ne la refuserais pas. Maintenant, les meilleures opportunités qui s’offrent à moi sont dans le cadre du MX3. J’en suis content. En MX3, je suis au top tandis qu’en MX1, je serais peut-être un niveau en dessous. »

L’an prochain, auras-tu encore du matériel d’usine?

Sven Breugelmans: « Non, il n’en est plus question. Le team d’usine a cessé ses activités pour des raisons financières et c’est la raison pour laquelle ils ne voulaient plus me garder. On aura toujours du matériel en provenance de l’usine mais rien en ce qui concerne les bloc moteurs ou un soutien quelconque en provenance directe de l’usine. C’est vrai que si on devait connaître des problème particuliers avec la moto, il y aurait toujours des gens de chez KTM pour nous aider. De ce côté-là, je n’ai aucune crainte. »

Tu te trouves bien dans le Pater MX Team mais tu ne t’attendais pas à ce que KTM supporte un champion du monde en titre?

Sven Breugelmans: « Ils ont toujours dit qu’ils continueraient à m’aider ainsi que le team auquel j’appartiendrais. Lorsque je discutais avec le Silent Team, KTM m’avait également déclaré qu’ils continueraient à m’aider. « 


« Rouler dans le Pater MX Team me satisfait pleinement. Trouver un team de renommée internationale était pratiquement mission impossible. Même Husqvarna ne s’intéresse pas à un champion du monde! »

Comment as-tu réagi lorsque tu as appris que le team d’usine KTM arrêtait en MX3?

Sven Breugelmans: « Je l’ai appris deux ou trois GP avant la fin du championnat. Jacky (Martens, NDLR) espérait faire pression sur eux si nous remportions le titre mondial mais il n’y est pas arrivé. J’ai donc dà» rechercher un nouveau yeam. Je suis allé d’abord chez Husqvarna mais ceux-ci n’étaient intéressés que par les marchés italien et français. Un pilote belge ne les intéressait donc pas. »

Le champion du monde MX3 ne les intéressait pas?

Sven Breugelmans: « Non. Seulement des pilotes italiens ou français. En Belgique, on trouve seulement deux ou trois Husqvarna sur les épreuves et ce n’était donc pas intéressant pour eux. »

La fin du team KTM signifiait en même temps la fin de ta collaboration avec Jacky Martens. Au total, vous avez travaillé cinq ans ensemble. Ce n’est pas rien, non?

Sven Breugelmans: « C’est évident. Jacky et moi avons toujours bien travaillé ensemble. On se connaissait fatalement très bien. La fin de cette collaboration entraîne une grande inconnue pour moi. Je ne sais pas encore comment on va travailler au sein du Pater Team. Maintenant, il faut faire confiance et voir comment les choses vont se passer entre nous. »


« Sans le soutien de Jacky Martens, cela ferait peut-être cinq ans que je roulerais dans une fédération amateur. »

Ta collaboration sportive avec Jacky était une chose mais il y avait surtout des liens affectifs entre vous. Jacky t’a notamment offert une place dans son team alors que les choses n’allaient pas bien pour toi…

Sven Breugelmans: « J’en serai d’ailleurs toujours reconnaissant à Jacky. Il m’a redonné ma chance en GP alors que tout semblait définitevement perdu pour moi. J’ai saisi cette chance à deux mains et j’ai pu le remercier avec un titre mondial la seconde année de notre collaboration. Sans le soutien de Jacky, cela ferait peut-être cinq ans que je roulerais dans une fédération amateur. En outre, Jacky est le meilleut team manager que j’aie jamais eu. »

Jacky va désormais passer en MX2 où il s’occupera des jeunes pilotes pour le leam KTM. Un beau signe de confiance envers lui de la part de KTM, non?

Sven Breugelmans: « En effet, Jacky dispose de trois excellents pilotes avec lesquels travailler en 2009. Des jeunes susceptibles de remporter un GP et de monter régulièrement sur le podium. Surtout, Jacky disposera d’un excellent matériel. Je suis persuadé qu’il réalisera une excellente saison. »

L’an dernier, tes prestations n’étaient pas très régulières. Tu alternais des victoires avec des prestations médiocres. Avant la saison dernière, tu nous avais déjà déclaré vouloir être plus constant. Entre dire et faire, ce n’est pas évident, si?

Sven Breugelmans: « Oui, c’est vrai. Ce n’est pas facile de trouver une solution à ce manque de régularité. C’est long, un championnat… Chacun effectue de bonnes courses mais c’est celui qui réalise le moins de mauvaises courses qui l’emporte à la fin. Essayons donc de réduire le nombre de GP à faible performance! »

En début de saison, tu as dà» t’adapter à la KTM 450 alors que précédemment, tu roulais sur une 540. L’adaptation n’aurait-elle pas été si facile?

Sven Breugelmans: « Si, car j’ai disposé cette année d’une vraiment bonne moto. Peut-être un peu trop puissante pour certaines épreuves. Je me dois de dire que durant toutes les années où j’ai roulé sous les ordres de Jacky, j’ai toujours bénéficié d’une excellente machine. »

Voici quelques mois, lors d’une interview croisée avec Kristof Salaets, tu laissais clairement entendre que que le Championnat du Monde MX3 devait être mieux respecté par les supporters, les organisateurs et les médias. Tu as changé d’avis depuis ton deuxième titre mondial?

Sven Breugelmans: « On est sur la bonne voie. L’an prochain, Youthstream va faire en sorte que les médias portent plus d’attention à ce qui se passe en MX3. C’est ainsi qu’il y aura des caméras supplémentaires afin de réaliser des compte-rendus des épreuves de meilleure qualité. Les tentes de la pitlane du MX1/MX2 devraient servir aussi pour le MX3, à ce que j’ai entendu. Cela devrait rendre les épreuves plus professionnelles. Enfin, je me suis rendu sur divers salons internationaux au cours de ces dernières semaines et je me suis aperçu que les gens de l’industrie me connaissaient, même si je suis malgré tout le champion du monde MX3! Je pense qu’il vaut mieux être champion du monde en MX3 que le quinzième en MX1. »

Lors de ces dernières années, le Championnat du Monde MX3 était une voie de garage pour les pilotes qui n’arrivaient plus à occuper les avant-poste en MX1. C’était une version au rabais du Championnat du Monde. Maintenant, on apprend que les pilotes MX3 devront malgré tout rassembler des centaines de milliers d’euros pour participer à ce championnat. Ne penses-tu pas que cela risque d’hypothéquer l’avenir du Championnat du Monde?

Sven Breugelmans: « Cela me paraît effectivement dangereux, surtout s’il en est de même pour les participants au Championnat d’Europe. Hélas, nous, les pilotes, il n’y a pas grand’ chose que nous puissions faire à ce niveau. J’espère simplement qu’on n’en arrivera pas là. Si c’était le cas, je pense que les organisateurs verront le nombre de participants dramatiquement chuter. On y verra plus clair lorsque Youthstream dévoilera ses tarifs. Franchement, je n’y comprends rien. Lorsque tu vois ce que sont déjà nos frais réels, ne fà»t-ce que pour les déplacements qui coà»tent chaque année plus chers. Maintenant, s’ils disent qu’il faut payer, il faudra bien s’incliner. Je ne vois pas d’échappatoire. »

Ton co-équipier dans ton nouveau team sera le vice-champion de Hollande Patrick Roos. Quelle est ton opinion à son sujet?

Sven Breugelmans: « Patrick est un excellent pilote, certainement sur les circuits sablonneux. Il manque peut-être d’entraînement et d’exprience sur les circuits en dur mais je crois que s’il passe un bon hiver, il peut faire d’excellents résultats en 2009. »

« Je voudrais participer à l’entièreté du Championnat de Belgique. »

Selon toi, les organisateurs du Championnat de Belgique ne tiennent absolument pas compte du calendrier MX3?

Sven Breugelmans: « Absolument. Je voudrais pouvoir participer à l’entièreté du Championnat de Belgique afin de voir à quelle place je pourrais terminer. L’an dernier, je me trouvais troisième ou quatrième à la mi-championnat mais, par la suite, j’ai manqué deux épreuves parce que je devais participer au MX3 de sorte que je suis redescendu vers la vingt-cinquième place. C’est dommage. Je trouve qu’il y a assez de dates libres que pour pouvoir tenir compte du calendrier MX3. Ce serait bien aussi pour mes supporters de pouvoir venir plus souvent me voir rouler en Belgique. »


Comment vois-tu globalement ta préparation pour la saison 2009?

Sven Breugelmans: « C’est encore difficile à dire. Cela fait deux mois que je n’ai plus roulé et je ne vais pouvoir recommencer à m’entraîner physiquement qu’à partir de demain: faire du jogging et du vélo. Quelques jours avant le trophée de fin d’année organisé par Motorgazet à Lille (en Flandre, NDLR), je pourrai sans doute remonter sur la moto. Si mes premiers entraînements se sont bien passés, je roulerai sans doute à Lille. Je voudrais bien, en tout cas, car il s’agit d’une organisation dans laquelle mes supporters sont très impliqués. Maintenant, il est clair que si les premiers entraînements sur la moto ne se déroulent pas bien, je renoncerai car je ne veux pas hypothéquer ma saison 2009 en MX3. »

Quels seront tes principaux concurrents l’an prochain?

Sven Breugelmans: « Les deux pilotes Husqvarna, Martin et Salvini, seront très forts. Thomas Allier ne sera pas à négliger de même peut-être que Mickà¤el Pichon, s’il participe à l’entièreté du championnat. Avec Pichon, tu ne sais jamais. Il peut ausi bien décider d’arrêter après deux épreuves. Enfin, on ne peut exclure l’une ou l’autre révélation parmi les nouveaux venus. »

Tu as mentionné le nom de Mickà¤el Pichon. Tu crois qu’il pourrait tenir toute une saison?

Sven Breugelmans: « Pour l’instant, je considère qu’il pourrait effectivement tenir toute une saison de GP. Je pense également qu’il va rouler très fort. Il est connu pour cela. Maintenant, l’expérience a démontré qu’il peut mettre un boulevard à tout le monde le samedi et rouler nettement moins bien le dimanche. Avec Pichon, tu ne sais jamais, comme je le disais précédemment… »

Ceci dit, malgré une concurrence de plus en plus importante, tu restes toutefois le grand favori pour la couronne 2009, non?

Sven Breugelmans: « Oui, je crois. La situation n’est pas nouvelle en ce qui me concerne et, comme pour les années précédentes, les choses ne seront pas plus faciles. La concurrence est de plus en plus forte et j’en suis bien conscient. »

En début d’année, tu es devenu le papa d’une petite fille, Maxime. Cela doit avoir amené du changement dans ta vie, non?

Sven Breugelmans: « Evidemment. Ma manière de vivre est désormais plus calme. Tout tourne maintenant autour de Maxime, à la maison. Tu peux avoir connu une mauvaise journée ou avoir mal couru; tu rentres à la maison et tu oublies tout. »

Tu serais donc devenu plus casanier?

Sven Breugelmans: « Cela se pourrait. Maintenant, c’est vrai que la famille a toujours été très importante pour moi. Tant mes parents que mon amie ou même d’autres membres de ma famille m’accompagnent souvent sur les circuits étrangers parce qu’ils savent que j’aime les avoir près de moi. »

Pour conclure, comment vois-tu idéalement ton avenir proche?

Sven Breugelmans: « C’est difficile à dire. J’ai signé un contrat d’un an avec avec le Pater MX Team et je vais dès lors m’efforcer de satisfaire au maximum mes employeurs. Nous verrons ensuite ce que l’avenir me réserve. Les choses pourraient évoluer favorablement dans le motocross et il y aurait alors peut-être de nouvelles possibilités dans ce sport en ce qui me concerne. »

Ton ancien rival, Yves Demaria est devenu le coach des pilotes dans le Gariboldi Yamaha Team, qui bénéficie du soutien direct de Yamaha Europe et de Yamaha Rinaldi. Tu pourrais suivre cette voie-là?

Sven Breugelmans: « Si après ma carrière de pilote, je pouvais rester dans le milieu, c’est clair que je signerais à deux mains. Le motocross est toute ma vie mais une chance comme celle qu’a eue Yves n’est pas donnée à tout le monde. »

Texte: Tommy Ivens | Photos: FVH & R. Verhagen

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