Interview Ken Roczen | Ken Roczen, le phénomène allemand

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« Le plus grand talent que l’Europe ait jamais connu », « Une technique phénoménale », « Une maturité incroyable »,… Voici un (petit) échantillon des déclarations qu’on a pu entendre au sujet de Ken Roczen, le jeune phénomène allemand de quinze ans. Celui-ci, malgré qu’il ait manqué les quatre premiers GP de la saison écoulée, est devenu le plus jeune pilote à avoir remporté un GP (Teutschenthal) tandis qu’il terminait cinquième au classement final MX2.

Sylvain Geboers: « Ken a le talent naturel d’un Joël Robert »

Avant de vous faire vivre notre entretien avec la nouvelle star allemande, il est intéressant de rappeler que Ken est, comme le raconte le patron de l’écurie Teka Suzuki, Sylvain Geboers, pratiquement ‘né sur une Suzuki’. Et Geboers de poursuivre: « Le manager de Ken, Mr. Poensgen, est en fait le responsable marketing de Suzuki Allemagne. Nous, chez Teka, nous sommes convaincus depuis quatre ans de l’extraordinaire talent de Ken. En effet, Ken était présent depuis toutes ces années sur toutes les manifestations européennes organisées par Suzuki et au cours desquelles il roulait sur les nouveaux modèles. »

« En fait, notre projet MX2 a démarré à cause de Ken. Nous nous sommes rapidement rendus compte de son talent exceptionnel. Evidemment, ce n’était qu’un enfant et il était évident qu’il fallait voir comment il allait évoluer physiquement. Très rapidement, nous avons constaté qu’il n’y aurait pas de problèmes à ce niveau. D’autant que son père s’en occupait très bien et que, surtout, Ken était hyper motivé en plus d’avoir un talent exceptionnel. Ken est vraiment unique. Il me fait songer à Joël Robert à son époque. Celui-ci bénéficiait également d’un talent naturel hors du commun. Ken est vraiment comme Joël. Ce sont les deux plus grands talents innés que j’ai connus dans ma carrière, sans oublier bien sà»r des garçons comme Stefan Everts et Dédé Malherbe et les prestations exceptionnelles qu ils’ont réalisées . C’est évidemment normal qu’à chaque nouvelle génération de pilotes, on découvre de nouveaux talents. Il y a eu aussi Eric, mon frère, puis est arrivé Stefan. Ce dernier était déjà mieux encadré mais je crois que Ken l’est encore davantage. Il bénéficie d’un encadrement idéal! »

« Suzuki-Teka n’empêchera pas Ken d’aller rouler aux Etats-Unis »

« Ainsi, alors qu’il n’avait que douze ans, il est allé disputer plusieurs épreuves aux Etats-Unis. Tout cela financé par Suzuki Allemagne et avec l’encadrement de G.R.P. (Geboers Racing Promotion, Ndlr.). Ce sont des possibilités dont n’a pas bénéficié Stefan, par exemple. »

Quant au fait que Ken pourrait vouloir aller rouler aux Etats-Unis à brève échéance, Sylvain Geboers ajoute : « Personne n’est égoïste dans son entourage. Nous partons du principe qu’il voudra un jour aller rouler aux Etats-Unis. Nous voulons simplement qu’il fasse le saut lorsqu’il sera prêt. En attendant, nous sommes à ses côtés pour que Ken réalise le maximum en MX2 puis éventuellement en MX1 en un minimum de temps afin qu’il soit prêt pour les Etats-Unis. Pour autant que cela reste son souhait, évidemment. Bref, je pense que tout le monde est sur la même longueur d’ondes. C’est capital.

Nous n’avons pas de perspectives à court terme. Ken est un pur produit Suzuki et nous voulons le conserver tel quel. Il doit encore se développer harmonieusement. Après, qu’il participe aux GP ou aux supercross américains, cela n’a pas d’importance. Finalement, c’est Suzuki qui en récoltera les fruits. Et même s’il arrivait que Ken trouve une autre infrastructure qui puisse lui apporter encore davantage, nous le laisserions partir. Il ne faut pas être égoïste. »

L’interview

Au cours des six mois écoulés, chacun a suivi tes performances avec étonnement et admiration. Pourtant, peu de gens savent exactement comment tu en es arrivé là. J’ai lu sur ton site internet que tu étais monté pour la première fois sur une moto à l’à¢ge de trois ans. Et ensuite, comment les choses se sont-elles passées?

Ken Roczen: « En fait, j’ai commencé à piloter dès l’à¢ge de deux ans et demi et j’ai participé à ma première course à l’à¢ge de trois ans. J’ai obtenu mon premier titre en 50cc mais il s’agissait d’un championnat régional dans le Land de Thuringe. J’ai d’ailleurs participé à ce championnat jusqu’à l’à¢ge de dix ans et j’ai été plusieurs fois champion. J’ai également participé à quelques épreuves en Belgique et en France durant cette période. J’ai même été second à Venray. C’est en 2004 que j’ai remporté mon premier titre un peu important, en devenant le plus jeune champion d’Allemagne en 85cc. L’année suivante, j’ai été lauréat du A.D.A.C. Junior Cup et vice-champion européen en catégorie 85cc. »

Ton premier grand succès international est survenu en 2007 lorsque tu as été champion du monde Juniors à Sevlievo, en Bulgarie. Cela doit te rappeler de bons souvenirs?

Ken Roczen: « Certainement. Cela a été un des plus beaux moments de ma carrière. Surtout qu’en 2006, je n’avais pu faire mieux que de remporter un titre de vice-champion. »

Cette saison, comme tu n’avais pas atteint l’à¢ge minimum autorisé, tu as dà» attendre le cinquième GP avant de faire tes grands débuts, lors du GP du Portugal. Pas mal de gens avaient fait beaucoup de bruit sur ton arrivée en MXGP. Cela n’a pas été trop difficile à vivre?

Ken Roczen (sourire): « Je crois que les gens de mon entourage étaient plus stressés que moi! C’est vrai que je me demandais comment les choses allaient se passer mais je suis parvenu à rester serein. Je savais qu’il fallait ‘laisser le temps au temps’, comme on dit… »

Tu es maintenant porté aux nues. Tout le monde ne tarit pas d’éloges à ton sujet. Comment fais-tu pour garder les deux pieds sur terre?

Ken Roczen: « Tout cela est bien sà»r flatteur mais je sais relativiser facilement les choses. Je fais toujours de mon mieux, que ce soit lorsque je roule ou dans mes rapports avec la presse et les supporters. Ce n’est pas évident d’être toujours disponible pour tout le monde, mais j’essaie au maximum de l’être. »

Lorsque le quintuple champion du monde Joël Smets, lors d’une interview, déclare que tu es le meilleur pilote que nous ayons eu jusqu’ici dans l’histoire du championnat du monde de motocross, cela doit quand même te faire décoller un peu, non?

Ken Roczen (large sourire): « Cela fait toujours plaisir d’entendre des choses comme cela, évidemment! »

Comme tu l’as dit plus haut, la pression qui a sévi lors de tes débuts en MXGP ne t‘a pas trop affecté. Je suppose que tes parents te protègent un maximum. Comment cela se passe-t-il avec eux?

Ken Roczen: « Mes parents font le maximum pour que je puisse exercer mon sport dans les meilleures conditions possibles et pour que je me rende sur les épreuves sans aucune pression. Comme je le dis souvent, mon père est mon double: il m’aide en toutes choses, s’occupe de ma préparation physique, me conseille pour le choix des meilleures trajectoires… Mon père aplanit les problèmes. Il veille sur moi depuis si longtemps… Ma mère me soutient envers et contre tout mais elle a peur lorsque je roule de sorte qu’elle reste généralement dans le mobilhome lors de mes courses. »

Les GP t’occupent maintenant à temps plein. Comment arrives-tu à combiner ta carrière de pilote avec les études?

Ken Roczen: « Depuis que je suis à¢gé de quinze ans, je ne suis plus obligé d’aller à l’école et je peux dès lors me concentrer à 100% sur ma carrière en GP. En Allemagne, ce n’est pas comme en Belgique. Nous ne devons pas aller à l’école jusque dix-huit ans. »

Tu as mis un terme définitif à tes études ou est-ce que tu comptes les reprendre lorsque ta carrière de pilote sera terminée?

Ken Roczen: « Non, pour moi, l’école c’est du passé. Je veux me concentrer, comme je l’ai dit, sur ma carrière en GP. »

Tu rêves d’une carrière aux Etats-Unis. Compte tenu de l’augmentation de l’à¢ge limite (dix-huit ans) pour rouler aux Etats-unis, il faudra que tu attendes encore un peu avant de faire le grand saut. C’est un sérieux contre-temps pour toi, j’imagine?

Ken Roczen: « Pas vraiment. En fait, je possède déjà ma licence Pro et je pourrai rouler aux Etats-Unis lorsque j’aurai seize ans. L’augmentation de la limite d’à¢ge concerne surtout les pilotes qui n’ont pas encore la licence Pro. Ceux-là devront attendre en effet plus longtemps. »

Quels sont tes projets pour ton proche avenir?

Ken Roczen: « je vais me préparer pour la prochaine saison des GP. Pour après, on verra bien. »

Jens Johansson (le coordinateur technique chez Teka Suzuki MX2) m’a dit que, l’an prochain, tu vas te battre pour le titre mondial en MX2…

Ken Roczen: « Oui, car je suis convaincu que je peux remporter le titre dès l’an prochain! J’espère pour cela ne pas me blesser, ni que personne d’autre ne se blesse, d’ailleurs! Ainsi, ce sera une saison formidable l’an prochain. J’en suis convaincu! »

Lors du GP à Teutschenthal, on a pu ressentir un effet Max Nagl-Ken Roczen. Subitement, il semblait que le motocross était à nouveau populaire en Allemagne. Tu as remarqué cela également?

Ken Roczen: « Oui, bien sà»r. Les supporters sont plus nombreux dès lors que des pilotes de leur pays sont aux avant-postes. A Teutschenthal, le public était venu en masse et c’était une formidable impression de voir nos compatriotes nous supporter. Il suffit de constater le nombre de gens qui entourent le camion Suzuki-Teka à chaque GP. En fait, on voit à de nombreuses choses que le motocross redevient populaire en Allemagne. »

Comme les ateliers de ton team se trouvent dans les bà¢timents de G.R.P. à Lommel, qui sont la base du team de Sylvain et d’Eric Geboers, tu as passé presque tout l’hiver dernier à t’entraîner dans le sable lourd qui se trouve à proximité immédiate des ateliers. Je suppose dès lors qu’il ne faut plus te convaincre de l’avantage qu’il y a à s’entraîner sur un tel type de terrain?

Ken Roczen: « C’est vrai que l’entraînement dans le sable lourd m’a apporté des avantages sur de nombreux plans. »

Tu vas participer à des supercross cet hiver?

Ken Roczen: « Je ne sais pas encore. Il n’y a rien de décidé à ce sujet. »

En parlant du team Suzuki de Sylvain et d’Eric Geboers, tu as la chance de travailler avec des gens qui ont révélé un certain nombre de pilotes et qui ont eux-mêmes connu beaucoup de succès en tant que pilotes. C’est un luxe que d’autres pilotes n’ont pas…

Ken Roczen: « C’est clair. Sylvain et Eric ont énormément d’expérience. C’est toujours intéressant de pouvoir discuter avec des gens comme eux. Ils m’ont donné énormément de conseils lors de la saison dernière. »

Une dernière question. Outre tes débuts en GP, que les gens attendaient avec impatience, il y a également un pilote, Jeffrey Herlings, sur lequel on fonde énormément d’espoirs. Pas mal de gens dans le monde du motocross pensent que Jeffrey pourrait devenir un de tes rivaux les plus sérieux. C’est aussi ton avis?

Ken Roczen: « Absolument. Nous verrons l’an prochain lequel de nous deux sera le plus fort! »

Texte: Tommy Ivens | Photos: Olivier Evrard

Carte de visite

Surnom: ‘Evil’
Date de naissance: 29 avril 1994
Lieu de naissance: Apolda
Domicile: Mattstedt
Hobby: le sport en général
Points forts: la soif de vaincre et le travail
Point faible: – n’en trouve pas (!)
Points culminants de sa (jeune) carrière: sa victoire en GP à Teutschenthal et son titre mondial en Juniors
Pilote favori: Ryan Dungey
Circuits favoris: Lommel & Perris Raceway
Plat favori: les pà¢tes
Boisson favorite: Red Bull
Musique préférée: Vanalles Wat
Ambition: devenir le meilleur pilote du monde
Site web: www.ken-roczen.com

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