Interview Evgeny Bobryshev | De la vitesse pure au motocross!

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La plupart de nos lecteurs ne le savent sans doute pas mais dans les années soixante-septante – période qu’on appelait la ‘guerre froide’ – pas mal de pilotes russes se trouvaient au sommet de la hiérachie du motocross mondial. Il semble que le sympathique Evgeny ‘J-Bob’ Bobryshev, 22 ans , ait bien l’intention de remettre son pays à  l’honneur dans le petit monde du motocross. En effet, le pilote CAS-Honda est en train d’épater tout le monde cette saison et il est d’ailleurs très sollicité en cette période de transferts. L’occasion pour MXM de vous offrir une interview exclusive d’Evgeny!

L’an dernier, tu as terminé vingtième du championnat du monde MX2 et, cette année, tu es en train créer la surprise en MX1. Comment expliques-tu cela?

Evgeny Bobryshev: « C’est vrai qu’en passant du MX2 au MX1, le changement a pu paraître énorme. Il ne faut cependant pas oublier que ma taille et mon poids ne constituaient pas un avantage pour rouler sur une 250. Dès l’instant où je suis monté sur une 450, je me suis senti à  l’aise. Le team m’a également beaucoup aidé afin que mon passage à  la 450 se déroule dans les meilleures conditions. Pour moi, le plus gros changement par rapport à  l’an dernier, ce sont la moto et le team. Toutes les pièces du puzzle se sont mises en place et les résultats ont suivi naturellement! »

Comment as-tu préparé ta saison durant l’hiver?

Evgeny Bobryshev: « Il faut savoir qu’en Russie, pendant l’hiver, les températures descendent jusqu’à  – 20°. Il n’est dès lors pas question de monter sur une moto et l’entraînement était purement physique. Pour l’anecdote, c’est vrai que j’ai un peu roulé avec des pneux à  clous, mais c’était uniquement pour le plaisir. Ce n’est qu’en janvier que je me suis entraîné sur la moto en Afrique du Sud, en compagnie de gareth (Swanepoel) et de Neil Prince (le team manager de CAS-Honda, Ndlr). »

Sur le plan physique, tu es probablement un des pilotes les plus costauds en MX1. Tu entretiens ta condition avec un préparateur particulier?

Evgeny Bobryshev: « Neil Prince et son beau-père m’encadrent dans mon entraînement, notamment sur le plan de l’alimentation. Auparavant, j’étais tout simplement à  l’écoute de ce que mon corps me disait. Si tu es fatigué, il est préférable de prendre un jour de repos. Ce qui signifie que tu as atteint tes limites sur le plan de l’entraînement. Je ne voudrais pas oublier de mentionner Harrie Van Hout (le mécanicien de Xavier Boog, Ndlr) qui m’a toujours bien conseillé depuis que je suis installé aux Pays-Bas, en 2005. »

Est-ce que tu pensais toi-même que tu pourrais créer la surprise cette saison en MX1?

Evgeny Bobryshev: « En début de saison, je n’avais pas vraiment un bon pressentiment, non. Imaginer que je pourrais mener la course au GP de Lettonie, cela appartenait au domaine du rêve. Mon objectif était de faire tout simplement de mon mieux et de marquer régulièrement des points. C’est vrai qu’au fur et à  mesure que les choses vont bien, tu révises tes objectifs à  la hausse. Lors du GP de Lettonie, c’était fantastique d’être en tête mais, sur la fin, j’étais complètement vidé et Desalle a fini par me dépasser de sorte que je me suis finalement retrouvé au pied du podium. En Suède, cela a été la même chanson avec Ramon qui m’empêche de monter sur le podium. C’est évident que j’attends avec impatience de monter sur mon premier podium! »

Tu réalises actuellement une belle performance en étant en tête du Maxxis British Championship…

Evgeny Bobryshev: « Oui, c’est vrai. En plus, c’est un championnat qui me plaît car il est très relevé et l’organisation y est toujours impeccable, avec de beaux circuits. Je suis certain que le fait que je me rende toujours avec un grand sourire sur ces épreuves contribuent aussi à  mes bons résultats! »

Parle-nous un peu de l’endroit où tu habites, en Russie…

Evgeny Bobryshev: « J’ai grandi à  environ 200 km au sud de Moscou, dans une petite ville qui s’appelle Kondrovo. Mon père y possède son propre circuit en plus d’un circuit en sable. J’y suis retourné pour me détendre après le GP de Suède. Il y faisait très chaud et j’ai dès lors passé la majorité de mon temps dans la piscine. Durant l’interruption estivale, j’ai évidemment entretenu ma condition physique mais j’ai peu roulé. C’est la bonne manière afin de garder son appétit pour la moto. C’était également important pour moi de revoir ma famille. Au moment du GP de Suède, cela faisait trois mois que je n’avais plus vu ma famille et elle commençait à  me manquer. Après ces vacances, mes accus étaient complètement rechargés! »

Ton père était un pilote de motocross de haut niveau?

Evgeny Bobryshev: « En effet, mon père a été deux fois champion de Russie en 500cc. Il était vraiment à  l’aise sur sa 500 et je ne comprends toujours pas comment il s’y prenait avec cette moto! Chez CAS-Honda, nous avons une Honda CR 500, exactement comme celle qu’il possédait. Je l’ai essayée récemment. Ce n’est tout bonnement pas croyable une moto avec une telle puissance! Je suis vraiment très reconnaissant envers mon père, surtout à  l’époque où je roulais en 85cc. Je m’entraînais deux fois par jour et c’était donc un programme très chargé. »

Tu as assisté au dernier GP organisé en Russie, en 2002?

Evgeny Bobryshev: « Oui, mais en simple spectateur qui n’avait aucune idée de qui pouvaient être les pilotes. Je ne connaissais en effet aucun nom de pilote. Tout ce dont je me souviens, c’est que je n’ai perdu aucune miette de ce GP. Je me souviens aussi de ce que je m’étais fait prendre en photo avec beaucoup de pilotes. Avec qui, je ne m’en souviens plus! S’il y aura un GP en Russie dans un avenir proche? Aucune idée, vraiment. Je l’espère évidemment mais tout ne se passe pas très bien actuellement au sein de la fédération motocycliste russe. On verra. »

Avant que tu ne participes au championnat d’Europe et que tu ne viennes t’installer en Europe de l’Ouest pour participer à  des épreuves de motocross, n’avais-tu pas déjà  pris part à  des courses de vitesse pure auparavant?

Evgeny Bobryshev: « En 2004, j’ai effectué une saison en 125cc. Nous avions racheté la Honda de Mika Kallio, une vraie machine de GP! Je suis devenu champion de Russie cette même année. Le problème avec ces motos deux-temps, c’est qu’il faut sans cesse les pousser jusqu’au rupteur pour en sortir quelque chose et, question, bruit, ce n’est pas ce qui me plaît le plus. Je préfère nettement le bruit d’un deux-temps de motocross au bruit d’un deux-temps de moto de vitesse pure. L’année précédente, j’avais roulé sur une 600cc et c’était nettement plus agréable. Avec une 125cc, tu dois toujours être à  fond. J’ai eu un grave accident sur ce type de moto et je ne me souviens pas avoir jamais autant souffert de ma vie. Une anecdote: j’étais allé roulé en Finlande et je me suis fait dépassé par un type qui avait des cheveux noirs très longs. Après la course, sur la pitlane, je me suis rendu compte que le pilote qui m’avait dépassé était en fait une fille: vraiment la honte! C’est à  partir de ce moment que je me suis rendu compte que la vitesse pure, c’était fini pour moi! Pourtant, je ne me plains pas de cette période en vitesse pure car c’était une expérience intéressante. J’ai même eu la possibilité, grace à  monsieur Nifantov, le président de la fédération russe des sports moteur, de participer à  des GP de vitesse pure. Ce grand monsieur m’a beaucoup aidé dans ma carrière mais il est malheureusement décédé l’été dernier. »

Ainsi donc, si Honda te proposait d’essayer la moto que Dani Pedrosa utilise en MotoGP, tu es partant?

Evgeny Bobryshev: « Tu parles! Je considère que les pilotes de MotoGP roulent sur de véritables projectiles. J’aurais certainement l’air ridicule sur ce type de moto mais, oui, je suis quand même partant. Je regarde d’ailleurs la MotoGP à  la TV quand c’est possible. »

Après une aussi belle saison, tu dois être pas mal sollicité durant cette période de transferts?

Evgeny Bobryshev: « Oui, c’est vrai qu’on me manifeste assez bien d’intérêt mais il n’y a vraiment rien de bien concret. Il faut tenir compte de pas mal de paramètres pour faire de bons résultats: la moto, le team… L’expérience m’a appris que les choses n’arrivent pas par magie. »

Tu as la réputation d’être quelqu’un qui a beaucoup de caractère…

Evgeny Bobryshev: « Comme lorsque j’ai roulé avec une blessure grave à  la cheville? Pour moi, si tu peux rouler alors que tu es blessé, pourquoi ne pas le faire? C’est vrai que cela fait très mal mais c’est le genre de problème qu’on doit pouvoir surmonter. Tu es quand même un mec, non? Tu ne vas pas rester là  à  pleurer comme une fillette! Quand tu roules en motocross, il faut que tu sois fort mentalement pour pouvoir continuer, même lorsque c’est devenu difficile. »

Merci pour l’entretien, J-Bob!

Evgeny Bobryshev: « (se marre) Cela fait longtemps qu’on ne m’avait plus appélé par ce surnom qu’on m’avait donné lors de ma période chez Vangani. C’est marrant. En Angleterre, ils me disent tout simplement ‘Boby’. Je suis curieux de savoir comment on va m’appeler au Brésil! »

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