Essai Husqvarna Factory 2014

Husqvarna, de l’ombre à la lumière

Husqvarna, de l’ombre à la lumière
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Il y a des opportunités à côté desquelles on ne peut pas passer. Alors, lorsqu’un petit mail du redac-chef me proposant la visite des ateliers des teams officiels Husqvarna suivie du petit essai qui va avec le lendemain sur la piste de GP de Valkenswaard en Hollande, est tombé dans mon courrier,  je n’ai pas mis très longtemps à me laisser convaincre. Rendez-vous était donc pris à Lommel, lieu hautement stratégique du MX mondial où Husqvarna a installé il y a à pein plus d’un an ses quartiers généraux. Découvrons l’envers du décor de deux des plus prestigieux teams du paddock MXGP…

Par Christophe Bertrand

Parti d’une feuille blanche en octobre 2013, le team ICE ONE HUSQVARNA, dont le propriétaire n’est autre que le pilote de F1 Kimi Raikkonen, avait la lourde tâche de relancer Husky sur le devant de la scène en catégorie MXGP. Le team est managé par l’ancien pilote de GP, Anti Pyrhonen, épaulé par notre compatriote Peter Dirkx, excellent pilote de GP dans les années 80-90, en tant que chef-mécano.

Ordre et rigueur sont de mise chez Ice One...

Ordre et rigueur sont de mise chez Ice One…

Au départ articulé autour de 2 pilotes « exotiques » avec le Sud-Africain Tyla Rattray, de retour des US, et l’Australien Todd Waters, le team n’aura pas été épargné par les blessures de ses 2 pilotes et c’est finalement un autre Australien, Dean Ferris, rapatrié dare-dare des US, qui finira la saison avant de se briser la jambe lors de la finale au Mexique.

Au niveau de l’organisation proprement dite, chaque pilote dispose de 2 motos pour les GP et d’une moto d’entraînement très proche des 2 autres afin de permettre aux pilotes de garder les mêmes repères. La cylindrée n’étant pas imposée, le choix de rouler sur la 350 ou la 450 se fait durant les essais hivernaux. Il est cependant fixé pour toute la saison, il ne s’agit pas de changer de moteur en fonction du circuit.

Ordre et rigueur

Le team dispose de 3 stocks de pièces identiques dont un dans la semi qui se déplace sur les courses. Ici, on ne badine pas avec l’ordre et la rigueur ! La recette qui a fait et continue de faire la réussite de KTM ces dernières années est appliquée également chez Husqvarna, bien que la marque se défende de tout parallèle avec sa cousine autrichienne.

Tous les 2 GP, les moteurs sont retournés à l’usine de Mattighofen pour vérification complète et toutes les 3 courses les motos sont complètement remises à neuf. Le team n’intervient jamais sur les moteurs.

Concernant les suspensions, le suivi est confié au service course de White Power en Hollande. On note également le renforcement du cadre d’origine, lequel garde cependant la même géométrie.

La superbe FC 350 Factory de Dean Ferris

La superbe FC 350 Factory de Dean Ferris

Au niveau de l’équipement principal, ICE ONE fait confiance à FMF pour les échappements (5 modèles disponibles), PIRELLI pour les pneumatiques, PRO TAPER pour les guidons et pignons. La panoplie des pièces racing du catalogue HVA étant évidemment étalée sur les machines officielle afin de leur offrir un look encore plus accrocheur.

A noter que les 2 motos de GP ne servent que pour les GP afin de laisser le temps aux mécanos de travailler dans les meilleures conditions et sans précipitation.

 

Les ambitions du team sont très claires: après une saison de lancement et vu l’intérêt suscité par le retour d’Husqvarna au plus haut niveau, il s’agira de miser sur le bon cheval afin de concrétiser par un résultat final en 2015. L’arrivée de Max Nagl vient d’être annoncée (lire notre article). Voilà qui confirme les ambitions du team ICE ONE de jouer les tout premiers rôles en MXGP l’an prochain.

 

100% MX2: le team Husqvarna Wilvo – Nestaan Martens

Un petit contour du zoning industriel de Lommel et on se retrouve face à l’énorme grille donnant sur le magnifique bâtiment construit voici 6 ans par notre ex-champion du Monde 500 (déjà sur Husky) Jacky Martens. Atelier immense, composé d’une partie Grand-Prix avec les 4 motos des pilotes officiels 2014 : le Français Romain Febvre (3ème du dernier championnat Mx2) et le russe Alexander Tonkov.

Jacky Martens et Christophe Bertrand entourés de la machine de Romain Fèbvre et de la Husky avec laquelle Jacky fut champion du monde 500 en 1994.

Jacky Martens et Christophe Bertrand entourés de la machine de Romain Fèbvre et de la Husky avec laquelle Jacky fut champion du monde 500 en 1994.

De l’autre côté de l’immense hall, un atelier destiné aux motos d’entraînement sur lesquelles Jacky développe et teste énormément d’évolutions. L’organisation est fort similaire au team MXGP au niveau des changements de moteurs mais avec la la grosse particularité que l’usine laisse la liberté à Jacky de développer lui-même certaines pièces qui devront être testées et validées.

Le labo de Jacky

C’est à l’étage surplombant les 4 motos de GP que notre compatriote s’est concocté son petit coin pour travailler lui-même sur les suspensions White Power et usiner certaines pièces moteur. Mister Martens est parait-il un éternel insatisfait, toujours à la recherche du petit détail pouvant améliorer ses motos. Sa devise est d’ailleurs : « Chez nous, on travaille la semaine pour le week-end ».

Ses jeunes recrues suivent également la même politique et pour mériter une bonne bécane, Jacky met à leur disposition une salle de sport High Tech, un préparateur physique et un programme qui ont déjà permis l’éclosion de nombreux talents, le dernier en date étant évidemment Romain Fèbvre.

A tous les niveaux, on peut ressentir toute l’expérience acquise depuis de nombreuses années dans le milieu pour ne ressortir que le positif et améliorer sans cesse son team.

Une salle de sport est à disposition des pilotes du team de Jacky Martens.

Une salle de sport est à disposition des pilotes du team de Jacky Martens.

Notons que, pour la saison 2015, le team HUSQVARNA WILVO NESTAAN MARTENS (désolé c’est un peu long,…) repart avec le jeune Tonkov mais fait aussi sa grande entrée en MXGP en récupérant Dean FERRIS chez le voisin ICE ONE au guidon de la 350.

Pour l’équipement de ses motos, le team bénéficie du support de Golden Tyres pour les pneumatiques, de roues à moyeux bleus HAAN Wheels et de superbes tés de fourche STF (développés par les frères Wagner) permettant à la fourche de toujours travailler dans l’axe, quelles ques soient les contraintes.

La marque FMF s’occupe également des pots d’échappement, RENTHAL des guidons et pignons alors que les filtres à air sont fournis par DT1 qui n’est autre que la marque du grand ami et ancien coéquipier de Jacky, Johan Boonen.

On remarque également une boîte à filtre full carbone de toute beauté associée à de nombreuses pièces de protection de même matériau.

Toutes en piste

Un essai de motos d’usines reste toujours un moment privilégié. Il ne s’agit pas de dire j’aime ou j’aime pas, c’est le pilote qui décide dans quelles directions développer la moto. Je vais malgré tout tenter de vous faire partager mon expérience. Direction Valkenswaard et un circuit de sable noir bien détrempé pour découvrir nos 4 Husky Factory. Arrivé sur place, les 2 teams ont déployé leurs structures avec les mécanos de GP et surtout les 7 bécanes mises à notre disposition.

Je vais donc passer ma matinée dans le team Martens et commencer par la 250 de Romain Fèbvre, 3ème du dernier mondial MX2.

Je veux la même…

De prime abord, rien de spécial au niveau du poste de commande sinon que Fèbvre et Tonkov roulent avec un guidon et des leviers placés vers le bas. Petite mise en jambe lors du 1er tour, je me sens très rapidement en confiance et le 2ème tour sera déjà l’occasion de m’envoyer le long double saut à l’arrière du circuit.

Malgré un sentiment d’évoluer avec des suspensions trop souples, la n°461 s’avère très confortable et sécurisante. La piste est piégeuse mais le rythme augmente et les soupapes s’affolent… Quelle santé ! Malgré un petit manque à bas régime, le moteur prend tellement de tours à mi et haut régimes qu’on en oublie ce petit désagrément.

Je serais curieux de connaître la puissance délivrée sur un banc d’essais en comparaison avec une 250 2T, tellement ce moteur pousse à tous les étages. Les conditions de roulage sur cette surface dévoreuse de puissance me donnent évidemment une idée du potentiel de cette Husky 250 sur piste dure.

La 250 de Fèbvre est, comme l'on s'y attendait, impressionnante !

La 250 de Fèbvre est, comme l’on s’y attendait, impressionnante !

Les souvenirs du passé sur cette même piste dans le grand fer à cheval au centre du circuit où il était absolument nécessaire de relancer ma 125cc 2T à l’embrayage sont illico balayés… Quelle chance d’évoluer sur une moto aussi facile ! Cependant, ces motos d’usine utilisent des batteries sans alternateurs et c’est à pied que j’ai ramené « la bête » au bercail, le quota de démarrages ayant été dépassé…

Fort similaire en apparence, la moto d’Aleksandr Tonkov dévoile de suite un comportement plus électrique, avec un peu plus de bas régime mais aussi une prise de tours/min moins impressionnante.

Suspensions un poil plus fermes, allumage différent, je la trouve moins fun à piloter comparée à celle de Romain mais on reste évidemment dans l’exceptionnel comparé à la 250 stock essayée en juin en Suède et déjà très performante. Il n’y a pas photo, on atteint avec ces deux 250 4T un autre niveau de performance.

Un petit comparatif de ces motos lors des départs s’imposait également afin de comprendre pourquoi nos 2 obus trustent aussi régulièrement les premières places en bout de ligne droite. Pas de surprise, l’allonge phénoménale du moteur (particulièrement la moto de Romain Fèbvre) permet de tirer le 2ème rapport un poil plus loin que la concurrence et ainsi passer les coudes, le reste n’étant plus qu’une gestion du freinage et de la trajectoire pour viser le holeshot.

En résumé, ces 2 Husqvarna sont mieux partout, upgradées en quelque sorte par rapport à la série. Nul doute que le team belge fera encore parler lui en 2015.


Des machines réservées à l’élite

Super enthousiaste lors des essais presse de la gamme 2015 et particulièrement sous le charme du modèle 350, je me posais la question de savoir ce qu’allaient me pouvoir encore me réserver les machines de Dean Ferris et de Todd Waters ? Réponse après quelques centaines de mètres,… La 350 Factory est assurément réservée à l’élite, aux pilotes pros super entraînés.

La 350 Factory est survitaminée. Une machine réservée à l'élite.

La 350 Factory est survitaminée. Une machine réservée à l’élite.

Difficile de prendre son pied tellement le moteur est survitaminé, la puissance vient dès les plus bas régimes et le moteur prend des tours à n’en plus finir. Exceptionnel ! Le châssis est au même diapason, très ferme. Alors inutile de dire que c’est bon ou pas bon. La moto est développée en fonction des desideratas du pilote mais il est évident que cette version ne conviendra pas à beaucoup de pilotes, même parmi les plus aguerris, dont  je pense faire partie. La 350 stock et sa puissance domestiquée me suffisent amplement !

Je me suis finalement éclaté quelques tours mais je n’ai vraiment pas envie de reprendre un entraînement de triathlète pour réellement savourer les qualités de cette moto définitivement hors normes.

Last but not least, je termine par la 450 de Todd Waters. Au final, moins impressionnante  que la 350, cette 450 respire évidemment la grande forme mais rien de spectaculaire par rapport au modèle de série qui dégageait déjà énormément de puissance. Ce pur-sang ne pourra évidemment lui aussi être exploité que par une élite. Faites gaffe aux coups de pompe en fin de manche sous peine de vous « satelliser » !

Je m’attendais à un travail sur le châssis et sur le moteur afin de rendre cette 450 plus exploitable, plus confortable et donc plus efficace. Je reste un peu sur ma faim sur ce point mais attention, l’objectif de ces motos est bien de chasser le chrono et non d’offrir un confort exemplaire à leur pilote. On pourra malgré tout s’interroger sur les nombreuses blessures encourues durant cette saison 2014. N’est-on pas dans l’excès ?

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Une chose est sûre, la nouvelle ère Husqvarna est sur les rails. Les résultats en MX2 le prouvent. Il leur reste maintenant à concrétiser dans la catégorie reine le plus vite possible après les coups d’éclat de 2014. L’arrivée de Max Nagl chez ICE ONE devrait aider Husqvarna a retrouver le chemin du podium en MXGP.

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