On y est, c’est donc KTM qui ouvre la voie en équipant de série ses modèles enduros 2-temps de l’injection. Une technologie révolutionnaire pour les cylindres à trous qui aura finalement germé durant 13 ans dans les bureaux d’étude du département R&D des autrichiens afin de répondre et d’anticiper les nouvelles normes d’homologation européennes en matière d’émissions polluantes.
Par Christophe Bertrand
Lors de la présentation en salle de presse, Joachim Sauer, le product marketing manager de toute la gamme off-road (30 ans de boîte quand même !) chez KTM ne boudait pas son plaisir et affichait une certaine fierté lorsqu’il nous a expliqué en long et en large la genèse du projet, le niveau de complexité dans la poursuite du but recherché mais surtout l’avancée technologique et les nombreux avantages procurés par l’injection électronique qui équipe les nouvelles 250 et 300 EXC TPI.
Le 2-temps n’est pas mort, loin de là ! Et KTM le prouve face à une désertion du segment par les fabricants japonais. Chiffres à l’appui. Sur 200 000 unités produites, le 2-temps représente pas moins de 60% du marché tout-terrain. Une bonne raison de poursuivre leurs investissements.
A la découverte des modèles exposés, rien de tape immédiatement à l’œil. Après la révolution des modèles enduros 2017, on reprend les mêmes standards châssis/équipements estampillés 2017, à l’exception de la fourche WP Xplor de 48 mm équipée des tubes modifiés issus de la gamme SX. Objectif : durcir pour éviter les talonnages tout en préservant le confort propre à la discipline. On note au passage des nouvelles protections de radiateur, plus faciles au nettoyage ainsi qu’un nouveau graphisme pour la déco.
Vous l’aurez compris, c’est évidemment au niveau du haut moteur que les nouvelles KTM 2018 se distinguent de la génération précédente.
Un peu de technique: un double injecteur vertical disposé sur l’arrière des transferts latéraux du nouveau cylindre, le premier pour les bas et mi- régimes, le second pour les hauts régimes. Un corps d’injection Dell’Orto de 39mm, 5 capteurs électroniques régulant la température et la pression, une pompe à essence, une pompe à huile issue des modèles 4-temps, un allumage et une batterie plus puissants, un boîtier de gestion (EMS) situé sous la selle et une boîte à air modifiée. Voilà pour la partie purement technique, interne et donc peu ou pas visible.
Sur le plan pratique, un réservoir d’huile séparé de 500 ml (translucide) placé à côté du corps d’injection permettra l’équivalent de 5 pleins, de quoi rider quelques centaines de kilomètres sans la traditionnelle fiole de mélange 2-temps bien connue des enduristes.
Point important, le remplissage se fait aisément au niveau de la colonne de direction juste devant le bouchon de réservoir et un témoin lumineux de réserve est également prévu sur le compteur garantissant une autonomie d’un plein.
KTM annonce une diminution de la consommation qui avoisine les 30%, ce qui tend à se rapprocher de l’appétit d’un 4-temps en mode randonnée. Vous l’aurez compris, plus de pré-mélange, une autonomie largement accrue avec le réservoir toujours transparent de 9 litres mais également et surtout une carburation auto-régulée quelles ques soient les conditions climatiques, atmosphériques ou les textures de sol.
L’injection optimise les performances de votre deux-temps, vous pouvez ranger votre trousse à outils et l’assortiment de gicleurs et autres aiguilles de richesse, fini de se compliquer la vie particulièrement lors des changements d’altitude.
Le dégagement de fumées est largement atténué, bien pour l’écologie tout ça ! Et dernier petit détail: s’il vous est déjà arrivé d’épandre de l’essence au sol lors d’une chute ou tout simplement dans votre garage en changeant des disques d’embrayage, et bien ici aussi la cuve de carbu qui se vide, c’est de l’histoire ancienne.
Bref, que du bonheur tout en gardant, du moins sur papier, un rendement et un comportement moteur identique voire supérieurs au modèle à carbu 2017 qui nous sert de référence.
A l’épreuve du parcours de l’Erzberg Rodeo !
Pour s’en convaincre, quoi de mieux que l’Autriche et sa fameuse carrière de l’Erzberg, théâtre chaque année d’une des courses les plus extrêmes au monde ? Pas de consigne, carte blanche au niveau du matériel mis à notre disposition et 4 groupes déterminés en fonction du niveau de pilotage des journalistes internationaux présents.
Habitué des franchissements en Belgique, je serai dans le groupe numéro 1 avec un nouveau guide d’exception en la personne de la nouvelle « perle » maison, l’Anglais Jonny Walker.
Un peu tête brûlée, une réputation qui me colle à la peau, l’ami Jonny ne s’est pas fait prier pour nous tester et mettre le matériel à rude épreuve. On est bien sûr parvenu à trouver nos limites, on s’est posé des questions devant certains obstacles mais au final, excepté un collègue américain, on est tous rentré indemne…les motos aussi !
Lors de la prise en main de la EXC TPI 250 le matin, je me retrouve évidemment en pays de connaissance, tout est identique au modèle 2017, la mise en marche électrique est immédiate et le terrain de jeu qui s’offre à nous s’apparente à un vrai « Disney Land » de l’enduro extrême.
Premier passage étriqué, première côte, la 250 affirme son caractère « punchy » et une montée en régime très rassurante. On est effectivement très proches du comportement de la version carbu 2017 qui avait rencontré tous les suffrages lors des essais espagnols l’an dernier.
Très proche mais pas aussi jouissive malgré tout, la 250 injectée semble s’étouffer légèrement dans les très bas régimes, gaz quasi coupés. Il faut l’emmener dans sa plage de confort et l’utilisation de l’embrayage sera nécessaire lorsque l’on s’enquille de longues grimpettes entre le 2ème et 3ème rapports. Au-delà, cela pousse grave avec une linéarité exemplaire. D’après certains responsables, quelques petits réglages sur l’injection sont possibles pour les pilotes plus exigeants, les réglages standards devant convenir à la majorité d’entre nous. On dira que je suis exigeant….
Au guidon de la moto équipée de la ligne d’échappement Akrapovic, excepté un bruit plus excitant et une plage un peu mieux remplie, le constat reste le même : c’est du tout bon avec ce petit bémol concernant le phénomène des très bas régimes où la 250 se comporte un peu en mode tracteur, ça ralenti sans jamais caler.
La 300 comme référence
Même position, un bruit plus rauque, la 300 EXC TPI s’est montrée irréprochable. Démarrage aisé, ici la courbe de puissance est pleine, elle est étonnement plus efficace dans les tourniquets que sa petite sœur tout en bénéficiant d’un couple supérieur.
La 300 atteint totalement les objectifs recherchés par les ingénieurs autrichiens : maintenir les qualités en termes de performance et de maniabilité du moteur à carbu en y associant tous les avantages (et ils sont nombreux) de l’injection et ce sur le long terme.
Notez que ces 2 modèles bénéficient d’une double courbe d’allumage sélectionnable grâce à un commodo au niveau du guidon, la position 1 étant la courbe standard, la 2 offrant davantage de motricité et de souplesse grâce à une puissance contenue. La position 2 s’est montrée intéressante et utile dans les parties sinueuses sur la 300. La 250 souffrant déjà d’un manque de vitalité sur la courbe 1, le choix était vite pris de ne pas l’utiliser. A vérifier évidemment sur piste humide.
Un petit mot sur le comportement des suspensions : on est sur du connu, l’ensemble WP assure parfaitement les contraintes de ce type terrain, pas de surprise, c’est précis et confortable. A vérifier sur piste plus rapide mais on n’est pas trop inquiet.
En fin de journée et malgré les sévices infligés aux différentes motos, aucun souci flagrant n’est à relever, ni les culbutes, ni les rochers, les surchauffes moteur ou encore les séances de free ride improvisées par Jonny Walker n’ont eu raison du millésime 2018 qui semble bien né.
Vous l’aurez donc bien compris, KTM n’est pas près de perdre son leadership sur le segment de l’Off Road et c’est déjà avec une longueur d’avance sur la concurrence que les Oranges peuvent envisager les années futures en proposant dès ce mois de Juillet ce qui est indéniablement un gros progrès technologique pour le client final.
Au niveau des tarifs, toute évolution a un prix , les versions d’origines seront disponibles à 8 930€ pour la 250 et 9 575€ pour la 300, ce qui fait en sorte que le 2-temps soit toujours plus abordable que la gamme 4-temps qui n’évolue pour 2018 que sur quelques détails. Une version 6 Days suréquipée avec une multitude de pièces issues du catalogue Power Parts est également disponible dans une robe bleu blanc rouge, en clin d’œil au 6 jours qui se dérouleront cette année en France.
Tarifs KTM enduro 2018
- KTM 250 EXC TPI : 8.930€
- KTM 300 EXC TPI : 9.575€
- KTM 250 EXC TPI SIX DAYS: 9.650€
- KTM 300 EXC TPI SIX DAYS: 10.205€