Dans un peu plus de deux semaines, 196 pilotes vont prendre le départ d’une des épreuves les plus exigeantes au monde. Le Red Bull KTM Team sera au départ avec le triple vainqueur de l’épreuve, Marc Toma, qui sera secondé par le Portugais Ruben Faria, le Chilien Francisco Lopez et enfin l’Espagnol Jordi Villadoms, récemment engagé par KTM afin de renforcer le team suite au tragique décès du pilote américain Kurt Caselli survenu à la Baja 1000.
Le responsable du team KTM Factory Rally, Alex Doringer, répond à quelques questions au moment où on commence à répertorier l’équipement qui n’a pas encore été embarqué vers l’Amérique du Sud.
Alex, dites-nous ce qui s’est passé ces derniers mois dans les ateliers du team KTM Factory Rally…
Alex Doringer: « De septembre à maintenant, beaucoup de choses se sont passées. Tout d’abord, en septembre, nous ne savions pas où nous en étions avec la moto ni de combien de pièces détachées nous aurions besoin pour monter la moto car celle-ci est complètement nouvelle en vue du Dakar 2014. Nous savions que la moto était hyper performante et que le moteur était puissant et fiable mais de septembre au moment où le bateau a quitté le Havre, nous avons été incroyablement occupés. »
« Il y a tellement de choses à prendre en compte; des petits détails dont il faut discuter, des dernières décisions à prendre concernant le team, les mécaniciens, parfois des petites choses mais qui peuvent devenir très importantes lorsqu’on est à pied d’Å“uvre. Il y a notamment beaucoup de préparation à effectuer concernant les véhicules, camions, toute la logistique… Non, vraiment, on a vraiment été très occupé, surtout avec le rallye du Maroc qui était la dernière épreuve avant le Dakar. »
« En outre, nous avons évidemment été très affectés par le décès de Kurt (Caselli) qui était un de mes bons amis. De nouveau, avec ce qui lui est arrivé, il a fallu reconsidérer nos plans. Il y a encore énormément à faire après que les camions sont expédiés. Le team compte 40 personnes, ce n’est pas rien. Ensuite, il y a les pilotes qui ne font pas partie du team et dont il faut également s’occuper. »
Comme vous l’avez mentionné, cette moto est entièrement nouvelle. Vous êtes néanmoins confiant?
Alex Doringer : « Chez KTM, nous avons accumulé beaucoup d’expérience concernant les moteurs et les motos. Notre plus gros avantage, c’est notre expérience acquise au Dakar et dans les rallyes d’une manière générale. C’est vrai que c’est toujours un nouveau challenge lorsqu’on sort une nouvelle moto. On ne peut pas tester une nouvelle moto dans les conditions du Dakar. C’est impensable que de tels tests puissent avoir lieu. Nous avons fait notre devoir à dans nos ateliers comme nous devions le faire. Les tests se sont bien déroulés et nous pensons être sur la liste des candidats à la victoire. »
Concernant les pilotes, parlez-nous un peu de leur personnalité. Comment se comportent-ils dans le cadre de leur travail et quel est leur attitude d’une manière générale?
Alex Doringer : « Je commencerai avec Marc Coma. Pendant un rallye, il a un grand souci de précision et c’est un plaisir de travailler avec lui car il est agréable en même temps que c’est un grand professionnel. Il apprécie toujours ce que le team fait pour lui. C‘est un garçon calme mais il est joyeux et disponible. »
« Ruben (Faria) est également très calme. Il a joué un rôle important lors du Dakar 2013 où il a terminé second et je pense qu’il a été surpris par son résultat. Il est unique et il est très motivé bien que d’une autre manière que Marc. »
« Tous les pilotes de rallye sont certes uniques mais le plus unique, si je peux dire, c’est Chaleco (Francisco Lopez). C’est un type qui est normalement calme mais il est vraiment motivé par le fait de réussir le meilleur résultat possible dans son propre pays (le Chili). C‘est un fantastique pilote mais il est parfois trop sauvage sur la moto même s’il a peut-être changé depuis le dernier Dakar. Il est un peu plus à¢gé et plus doux. Il réalise parfois qu’il est préférable d’aller plus lentement. Il est passionné par son sport et il est une des personnes qu’on cite lorsqu’on parle du Dakar. »
« Jordi (Villadoms) a été un pilote d’usine KTM dans le passé. C’est un fantastique coéquipier et lorsqu’il a fallu penser à un nouveau pilote pour le team, son nom est venu sur les lèvres de tout le monde. Même s’il nous rejoint dans des circonstances difficiles – la mort de Kurt- il est excité par le fait de revenir chez nous. Il n’a que trente-trois ans mais il a énormément d’expérience. C’est un type vraiment charmant et tout le monde au bivouac l’apprécie. Je crois qu’il a le potentiel pour progresser sur le plan des résultats même si son objectif principal est d’aider Marc. »
Ces derniers mois ont été bien remplis pour vous et votre team mais le bateau doit maintenant approcher de sa destination avec tout le matériel. J’imagine que cela doit être difficile de tout gérer et de s’assurer que tout a été effectué dans les moindres détails?
Alex Doringer: « Evidemment, s’occuper de toute l’organisation n’est pas une chose facile d’autant qu’il y a de nombreux aspects dont il faut tenir compte. En ce qui me concerne, j’ai la chance de disposer d’un team fantastique chez KTM. Chacun connaît ses responsabilités. Il y a de nombreuses choses dont nous devons nous occuper et qu’il faut agencer de sorte qu’il est important de superviser en vérifiant tout une deuxième fois. J’ai confiance dans mon team. Nos patrons, y compris Mr. Pierer, nous supportent à 100% et nous bénéficions toujours de l’aide dont nous avons besoin. »
Comme beaucoup le savent, KTM a perdu récemment en la personne de Kurt l’un de ses top pilotes dans un accident survenu lors de la Baja 1000. C’est fatalement une période difficile pour un team de rallye et vous devez faire face au décès de Kurt en même temps que vous devez remonter le moral des gens alors qu’on est très près du départ du Dakar?
Alex Doringer: »Il y a deux aspects à cette situation. A titre personnel, Kurt était un de mes bons amis et je connais également très bien sa famille. Au début, c’était très difficile et évidemment, c’est difficile d’imaginer comment il va falloir aller de l’avant parce que on est très choqué. D’un autre côté, nous sommes très professionnels et malheureusement, ce genre de choses peut arriver dans notre sport. En ce qui me concerne, je me suis senti un peu mieux après m’être entretenu avec la mère de Kurt. En effet, elle m’a dit qu’elle était bien consciente que ces courses étaient dangereuses, que ce genre de choses arrivait et que c’était ce qui s’était passé avec son fils. D’une certaine manière, notre programme chargé nous a permis de nous concentrer sur le travail à effectuer. Nous travaillons toujours avec un calendrier devant nous et il fallait que nous continuions à travailler mais au fond de chacun d’entre nous, nous savons que Kurt sera avec nous sur le Dakar. »
Après une période de travail aussi intense, j’imagine que chacun dans le team bénéficie d’une courte période de vacances pour Noël. Qu’est-ce qui va se passer après?
Alex Doringer: »Avant de nous envoler vers l’Amérique du Sud, chacun va effectivement bénéficier de quelques jours de congé bien mérités mais aussi nécessaires car le Dakar est dur pour tout le monde. Il y a énormément de stress avec des gens qui sont sur la route et qui n’ont pas beaucoup d’heures de sommeil. C’est un boulot très dur pour tous. En ce qui me concerne, je vais partir à la montagne pour faire du ski et me reposer afin d’être bien frais sur le départ du Dakar. »
Quelles seront les tà¢ches à effectuer lorque les gens du team arriveront à La Serena?
Alex Doringer: « Nous devons assembler les motos. Elles sont prêtes mais nous devons les roder afin que tout soit parfait car l’atmosphère et la température sont différentes là -bas. Il y a aussi de nombreux contacts avec les médias sur place. Notre team est important et c’est un gros travail que d’organiser les choses pour chaque membre du team sans oublier de prendre en compte la logistique pour les camions, motos et autres véhicules. J’ai parlé récemment avec Stefan Hubert, notre Manager Technique. Nous sommes d’accord pour dire que nous serons heureux quand la course débutera parce que cela signifiera que tout prendra son rythme et que les choses seront plus relax. »
En quoi le Dakar de cette année sera-t-il différent de celui des autres années?
Alex Doringer: »C’est mon quatrième Dakar et il y a beaucoup de gens qui affirment que cette année sera une année pivot pour le Dakar. Evidemment, il y aura plus de concurrence, notamment parce qu’un de nos anciens pilotes est passé à la concurrence (Cyril Despres chez Yamaha, NDLR). Pourtant, en fin de compte, le gros challenge, c’est le Dakar en soi et pas la concurrence. Nous constituons un groupe de personnes qui sont amis et sont là pour que chacun se sente bien durant l’épreuve. Je pense qu’en Afrique, le challenge était plus grand car on souffrait plus sur le plan physique. La plus grande différence cette année par rapport à l’année dernière, c’est que nous partons d’un endroit différent et que nous terminons à un endroit différent. Nous allons également parcourir un nouveau pays, la Bolivie, et nous aurons deux étapes marathon. Rien n’est devenu plus facile, c’est la difficulté qui change pour différentes raisons. C’est bien d’avoir un challenge plus relevé parce que cela nous aide à rester concentrés. »
Vous êtes nerveux à la veille d’entamer le Dakar?
Alex Doringer: »Non. En ce qui me concerne, il n’y a aucune raison d’être nerveux. J’ai confiance en nos motos, notre team et notre préparation. »
Qu’est ce qui est la meilleure chose dans le fait de diriger un team participant au Dakar?
Alex Doringer: « Les gens. »
Et la pire des choses?
Alex Doringer: « Apprendre qu’il y a eu un accident ou attendre des informations sur un pilote lorsqu’il y a eu un problème. »
Qu’est-ce qui fait exactement que KTM soit un team couronné de succès sur le Dakar?
Alex Doringer: « C’est une affaire de passion, d’histoire et d’expérience. Chacun travaille dans la même direction, de Mr. Piere aus mécaniciens. Lorsque je vais voir la ligne d’assemblage, je constate que chacun est intéressé par ce qu’il fait et cela rend les gens extrêment motivés. Nous avons vu pas mal de concurrents s’engager au Dakar puis ensuite le quitter. Nous n’avons jamais quitté le Dakar en ce qui nous concerne. Nous avons toujours cru en cette aventure, spécialement avec Heinz Kiniganer à bord et avec le soutien de Piet Beirer sans oublier bien sà»r l’intérêt que Mr. Pierer porte à tout ce que nous faisons. »