Aleksandr Tonkov est un pilote sur lequel il faudra certainement bientôt compter. Le jeune pilote russe roule sa seconde saison dans la catégorie MX2 et depuis quelques GP, il fait de plus en plus parler de lui. Nous l’avons interrogé afin de savoir pourquoi il était encore inscrit en championnat du monde MX2 alors que l’an dernier, il parlait de partir aux Etats-Unis. Nous lui avons évidemment également demandé quel effet cela faisait de se battre régulièrement pour une place sur le podium.
Aleksandr, après avoir realisé une belle saison chez Gariboldi Honda, nous nous attendions tous à ce que tu participes cette année au championnat américain de motocross comme cela semblait prévu. Que s’est-il passé pour que tu ne sois pas parti aux Etats-Unis?
Aleksandr Tonkov: ‘’C’est compliqué. Dans un premier temps, nous avions décidé avec mon sponsor ESTA d’aller aux Etats-Unis pour participer à la saison Outdoors et tout était en place pour qu’il en soit ainsi. J’étais chez moi depuis quelques mois à ne rien faire aprè!s le championnat du monde de motocross. Nous avons eu alors des problèmes dans le team et nous avons décidé de rester en GP. Les premières courses ont été difficiles car je n’avais pas beaucoup d’entraînement derrière moi vu qu’à l’origine, je pensais rouler beaucoup plus tard dans l’année. Lors du troisième GP à Valkenswaard, cela allait déjà beaucoup mieux mais c’est vrai qu’il a fallu quelques courses pour me remettre à niveau. Je me suis ensuite fracture le coude lors d’un entraînement ce qui m’a mis au repos pendant un mois. C’était dur d’autant que nous étions déjà en déficit d’entraînement. »
Tu as l’air plus costaud physiquement que l’an dernier. Qu’est ce qui a changé?
Aleksandr Tonkov : « Après ma blessure, j’étais vraiment furieux car nous revenions bien à ce moment-là . Je me suis alors dit qu’il fallait que je travaille vraiment très fort parce le temps passe vite. J’ai dix-neuf ans et je suis donc conscient qu’il faut que ce soit maintenant que les résultats arrivent. Je me sens nettement mieux cette année car je suis peut-être plus en confiance vu que je connais les circuits, les gens qui m’entourent sans oublier la moto qui marche bien. Mon frère est avec moi en permanence lors des entraînements et je m’entends très bien avec mon manager. L’an dernier, j’étais souvent seul, même quand je m’entraînais avec la moto et personne ne pouvait voir mes erreurs et ce que je pouvais améliorer. Maintenant, on me suit et mon manager, Bader Manneh est non seulement mon manager mais également mon ami, mon patron et pratiquement un second père! »
Cela doit être agréable d’avoir avec toi des gens dont la langue maternelle est le russe. Raconte-nous le rôle que joue ton frère auprès de toi…
Aleksandr Tonkov : « Mon frère a déjà fait de la compétition et il a participé au championnat d’Europe ainsi qu’à des GP. Il peut m’aider lors des entraînements et il me comprend. Je lui ai demandé d’arrêter la compétition cette année afin de pouvoir m’aider. Nous sommes un team privé chez J-Tech Racing et c’est utile de l’avoir avec moi afin de pouvoir réaliser nos objectifs. »
Tu peux nous dire comment le J-Tech Racing team a vu le jour et comment il fonctionne?
Aleksandr Tonkov : « Lorsque nous avons décidé de nous lancer dans la compétition, notre sponsor, ESTA, a pris le contrôle de tout. Ainsi, les gens savent que nous contrôlons ce que nous faisons. Pour le moment, nous n’avons pas la structure d’un véritable team; nous n’avons pas de camion ni d’auvent et aller sur les épreuves seuls serait beaucoup trop cher. Nous avons signé un accord avec J-Tech qui nous amène les motos sur les GP et nous procure un espace pour travailler. En réalité, nous louons notre emplacement dans l’auvent mais pour le reste, nous sommes en charge de tout. Nous sommes évidemment reconnaissants à J-Tech de nous avoir permis de faire ce que nous faisons. »
Tu peux nous dire ce qui est derrière le nom ESTA?
Aleksandr Tonkov : « ESTA est une entreprise énergétique russe qui a un département qui s’occupe de sports moteur. C’est ainsi que l’entreprise possède également une écurie Ferrari. Le patron d’ESTA est passionné par les sports mécaniques, surtout par le sport automobile et le motocross et il veut que les Russes puissent faire à nouveau de la compétition dans ces sports au plus haut niveau. Par le passé, il y avait beaucoup d’excellents pilotes russes en motocross et le niveau des pilotes est en train de s’améliorer à nouveau. Sur les GP, il y a maintenant Bobryshev, Brylyakov et moi-même et c’est agréable de voir que nous pouvons réaliser de bons résultats. ESTA est vraiment derrière moi. Pas seulement avec de l’argent. Ils s’impliquent à fond dans tout ce que je fais. »
Où vis-tu maintenant?
Aleksandr Tonkov : « Bonne question! Parfois, je vis en Italie, parfois en Belgique. Je crois que je vais à nouveau m’installer en Belgique pour l’été car les circuits sont maintenant secs et il fait vraiment très chaud en Italie pour le moment. Nous louons une maison en Belgique et nous possédons un appartement en Italie. J’aime beaucoup la Belgique mais je me sens chez moi en Italie vu que j’y suis depuis 2010. A part les périodes durant lesquelles j’ai été blessé, je ne suis resté que trois mois en Russie lors des trois dernières années. On peut donc dire que je suis rarement à la maison ! La saison démarre de plus en plus tôt de sorte que lorsque je rentre en Russie en octobre, je dois déjà revenir en Europe en novembre pour recommencer à m’entraîner. »
Tes parents viennent parfois te voir courir?
Aleksandr Tonkov : « A vrai dire, c’est assez compliqué pour eux de venir à cause des visas, des vols, etc. En effet, je ne vis pas près de Moscou. Mes parents ont leur maison à environ 2000 km de la capitale de sorte que prendre un vol pour l’Italie, c’est comme aller à New York. Mes parents travaillent et ils ne viennent donc pas me voir sur les GP. Ceci dit, nous sommes en contact régulièrement. »
Ta maison te manque?
Aleksandr Tonkov : « J’ai quitté la maison lorsque j’avais onze ans afin de participer au championnat de Russie et mon frère était avec moi vu qu’il participait également au championnat. C’était vraiment difficile. Je devais penser à la nourriture, au logement, à tout en réalité. C’est certain qu’à cette époque, mes parents m’ont manqué. C’est évidemment plus facile maintenant, surtout avec la technologie qui permet de se parler et de se voir. Parfois, j’ai tout simplement envie de voir ma maman et quand je suis fatigué, j’ai envie d’un cà¢lin et de la nourriture que ma maman me faisait mais dans l’ensemble, je ne me plains pas. »
Depuis le début de la saison, nous avons beaucoup entendu parler des améliorations apportées à ta moto pour cette année. A quel point ta CRF250R est-elle compétitive?
Aleksandr Tonkov : « C’est clair que le moto peut faire des podiums. J’en veux pour preuve que nous avons manqué le podium pour un point en France sans parler de l’Italie où j’ai commis une grossière erreur. Il est certain que la moto est importante, tout comme le pilotage, mais j’aime vraiment la Honda. C’est la seconde année que je roule sur cette moto et nous avons apporté beaucoup d’améliorations pour cette saison. Je l’aime vraiment; elle est confortable et nous avons maintenant trouvé la puissance de sorte que si tout se combinait au même moment, ce serait possible d’être devant. Contrairement à ce que beaucoup de gens disent, la différence n’est pas vraiment importante avec la KTM sur le plan des performances. Nous sommes très proches. »
Tu penses être capable de battre le leader du classement provisoire, Jeffrey Herlings ?
Aleksandr Tonkov : « Je crois effectivement que c’est possible. Cela ne sera pas facile car il bénéficie d’une excellente condition physique et il est très rapide mais tout est possible. Je ne dis pas que je pourrais le battre maintenant ni demain mais je ne roule pas pour finir deuxième et je travaille donc pour gagner. Je ne suis pas de ceux qui pensent qu’il ne sert à rien de trop travailler sous prétexte que Herlings est imbattable. J’ai roulé avec lui en 85cc et à cette époque, on s’est livré quelques beaux duels. Malheureusement, en 2010 et 2011, j’ai connu des problèmes avec le team alors que lui était pilote d’usine. J’ai alors perdu un peu confiance en même temps que du rythme de sorte qu’il a évolué plus vite que moi mais je le répète, je crois que je peux le battre. J’ai commencé à me sentir mieux, je me suis retrouvé en tête dans certaines courses. Ma vitesse est bonne, mes dépassements aussi et physiquement, je suis au point. Le tout, c’est de faire fonctionner tout cela en même temps. »
En quelques phrases, comment juges-tu ta saison jusqu’ici?
Aleksandr Tonkov : « Nous avons travaillé beaucoup sur les problèmes que nous rencontrions l’an dernier. Nous avons remédié aux points faibles et j’aime m’entraîner, ce qui est important. J’adhère totalement à notre planning d’entraînement . Il n’est pas trop difficile même s’il n’est pas facile non plus. Bref, je me sens toujours bien dans ce que nous faisons. Avant, je n’aimais pas m’entraîner et je le faisais parce qu’il fallait bien alors que maintenant, je vois les progrès que je réalise en m’entraînant. La prochaine étape, ce sont les podiums. Je suis heureux et relax de sorte que je me sens bien. C’est sà»r que j’apprends encore et parfois, ma détermination peut me jouer des mauvais tours comme cela a été le cas en Italie. J’ai cependant autour de moi des gens qui ont une bonne expérience des GP. Bader (Manneh) a remporté des GP et réalisé des podiums. Il m’aide pour trouver les bonnes trajectoires et appréhender les circuits. Non, je sens que j’ai maintenant tous les atouts en mains pour aller plus loin. »